Ce droit d’expression est affirmé par la loi et codifié sous l’article L2121-27-1 du Code Général des Collectivités Territoriales :

Dans les communes de 1 000 habitants et plus, lorsque des informations générales sur les réalisations et sur la gestion du conseil municipal sont diffusées par la commune, un espace est réservé à l’expression des conseillers élus sur une liste autre que celle ayant obtenu le plus de voix lors du dernier renouvellement du conseil municipal ou ayant déclaré ne pas appartenir à la majorité municipale.

Les modalités d’application du présent article sont définies par le règlement intérieur du conseil municipal.

Ce n’est que lorsque la commune diffuse un bulletin d’information générale que le conseil municipal est tenu de prévoir dans son règlement intérieur les conditions dans lesquelles un espace y est réservé à l’expression de la minorité, ce qui implique que le règlement intérieur soit adapté chaque fois que la collectivité se dote d’un instrument de communication entrant dans le champ d’application de l’article L. 2121-27-1 du Code Général des Collectivités Territoriales.

La notion de bulletin n’implique pas une limitation de son champ d’application aux seules diffusions d’information effectuées sur un support papier.

L’obligation de réserver un espace à l’expression de l’opposition « s’applique quel que soit le support d’information et inclut donc les bulletins d’information mis en ligne sur le réseau internet »

On peut retenir comme ligne directrice que

« toute mise à disposition du public de messages d’information portant sur les réalisations et la gestion du conseil municipal doit être regardée, quelle que soit la forme qu’elle revêt, comme la diffusion d’un bulletin d’information générale »

CAA Versailles, du 17 avril 2009, Ville de Versailles c/ de Lesquen : n°06VE00222

Cette décision aborde également la question des sites internet :

« si le site  internet de la commune, qui présente notamment les actions accomplies ou futures et la gestion de la commune , reprend la plupart des informations traitées dans le magazine Versailles, il les diffuse sous une forme différente » et doit ainsi « être regardé, eu égard à son contenu, comme constituant un bulletin d’information générale distinct », la ville de Versailles étant donc « tenue de réserver sur son site  un espace à l’expression des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale », espace qui « ne saurait être confondu avec celui du magazine Versailles au seul motif que ce dernier peut être consulté sur le site internet ».

Il paraît difficile de laisser de côté les sites Internet, qui sont un moyen de communication en plein développement, quand bien même les modalités pratiques de mise en œuvre du droit d’expression de la minorité seront plus délicates à déterminer pour un site Internet que pour une revue « papier » classique.

Voir en ce sens deux décisions rendues par des Tribunaux Administratifs :

« il ressort des pièces du dossier que, outre des informations pratiques, le site internet de la commune de Segré présente les activités de l’équipe municipale et diffuse les points de vue exprimés tant par des élus de la majorité que par des tiers ; qu’ainsi, ce site doit être regardé, eu égard à son contenu, comme constituant un bulletin d’information générale distinct du bulletin « Segré Infos » ; que, par suite, et nonobstant la circonstance qu’une version PDF dudit bulletin y serait consultable, la commune de Segré était tenue, en application des dispositions précitées de l’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales, de réserver sur ce site un espace à l’expression des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale  »

TA Nantes, 25 mars 2015, n°1407266

«  que la commune de Soisy-sous-Montmorency publie également un magazine mensuel de 4 pages intitulé « Soisy Infos », comportant notamment, à la date de la décision attaquée, un édito du maire de la commune, d’une demi-page environ ; qu’ainsi cette publication ne se borne pas à diffuser des informations générales ou pratiques mais constitue un bulletin d’information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal au sens des dispositions précitées de l’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales ; que, par ailleurs, si M. Y-Z soutient que le site Internet de la commune constitue également un tel bulletin, il n’établit pas, par les pièces qu’il produit, que ce site disposerait d’un contenu éditorial de nature à lui attribuer cette qualification ; qu’ainsi le requérant n’est fondé à soutenir que les dispositions de l’article 33 du règlement intérieur contesté sont également entachées d’illégalité seulement en ce qu’elles ne prévoient pas la mise à disposition d’un espace réservé à l’expression des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale dans la publication « Soisy Infos » »

TA Cergy-Pontoise, 19 février 2015, n° 1408481

C’est donc bien le contenu du support qui déterminé sa qualification. Si le site internet se borne à délivrer des informations générales sur la commune il n’est pas qualifié de bulletin d’information générale. Ces deux décisions illustrent parfaitement l’approche et la solution à retenir.


Par Michel FESSLER – Avocat Associé – Pôle Public