Voici un sujet à la croisée de trois pôles de compétences du cabinet : doit public, droit de la construction et droit de la copropriété.

Le propriétaire d’un garage dans un immeuble en copropriété souhaite le convertir en logement, mais il n’a pas l’accord de la copropriété. Ce copropriétaire sollicite un permis de construire et l’obtient. Le syndicat des copropriétaires le conteste devant la juridiction administrative.

Ce dernier soutenait notamment que le permis de construire ne pouvait pas être délivré faute de résolution autorisant les travaux.

Le Conseil d’État est saisi et commence par rappeler que :

En vertu de l’article R. 431-4 du même code, le dossier est réputé complet lorsqu’il comprend les informations et pièces limitativement énumérées aux articles R. 431-5 à R. 431-33-1, aucune autre information ou pièce ne pouvant être exigée par l’autorité compétente. Par ailleurs, le permis est délivré sous réserve du droit des tiers, il vérifie la conformité du projet aux règles et servitudes d’urbanisme, il ne vérifie pas si le projet respecte les autres réglementations et les règles de droit privé. Toute personne s’estimant lésée par la méconnaissance du droit de propriété ou d’autres dispositions de droit privé peut donc faire valoir ses droits en saisissant les tribunaux civils, même si le permis respecte les règles d’urbanisme.

Et de poursuivre :

Il résulte de ces dispositions que, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l’attestation prévue à l’article R. 431-5 du code de l’urbanisme selon laquelle il remplit les conditions fixées par l’article R. 423-1 du même code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Il résulte également de ces dispositions qu’une demande d’autorisation d’urbanisme concernant un terrain soumis au régime juridique de la copropriété peut être régulièrement présentée par son propriétaire, son mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par lui à exécuter les travaux, alors même que la réalisation de ces travaux serait subordonnée à l’autorisation de l’assemblée générale de la copropriété, une contestation sur ce point ne pouvant être portée, le cas échéant, que devant le juge judiciaire. Une contestation relative au défaut d’autorisation des travaux par l’assemblée générale de la copropriété ne saurait caractériser une fraude du pétitionnaire visant à tromper l’administration sur la qualité qu’il invoque à l’appui de sa demande d’autorisation d’urbanisme, l’absence d’une telle autorisation comme un refus d’autorisation des travaux envisagés par l’assemblée générale étant, par eux-mêmes, dépourvus d’incidence sur la qualité du copropriétaire à déposer une demande d’autorisation d’urbanisme et ne pouvant être utilement invoqués pour contester l’autorisation délivrée.

La seule qualité de propriétaire suffit donc pour déposer et obtenir le permis de construire.

Mettre en œuvre les travaux autorisés sera en revanche une autre affaire. En effet, si les travaux autorisés en vertu de ce permis étaient mis en œuvre sans l’accord des copropriétaires, le Conseil d’État rappelle que ces derniers disposent d’une action civile, tendant par exemple à la démolition ou la remise en état des lieux.


CE, 23 octobre 2020, ville de Paris : n°425457 | 425486